Objet de controverses, enjeu médical, culturel, éthique et politique, la nutrition est le rapport le plus intime et le plus vital de notre corps au monde extérieur. Elle occupe aussi nos pensées en raison des nombreuses options ouvertes dans une société de (relative) abondance.
Imposées ou choisies, les pratiques nutritionnelles exercent une influence sur notre santé et notre bien-être. Un corps bien nourri fonctionne mieux, c’est du simple bon sens.
Toutefois, la disparité des recommandations en matière de nutrition, et la pléthore de régimes supposés restaurer notre santé, quand ce n’est pas sauver la planète, conduit à un certain désarroi. Au final, ce matraquage de recettes engendre un scepticisme à l’égard d’injonctions contradictoires — à défaut simplistes, du style « cinq fruits et légumes par jour », voir le commentaire de Roland Cash (2008N1)…
Une des raisons de la vacuité des recommandations nutritionnelles officielles pourrait être attribuée aux biais méthodologiques des enquêtes sur lesquelles elles s’appuient. Ces travaux exploitent des corpus de données collectées par des méthodes « basées sur la mémoire » dont la pertinence est mise en doute par certains chercheurs — voir mon article Faut-il jeter les enquêtes nutritionnelles ?
Bien que la profession de diététicien nutritionnisteN2 soit régulée en France, je suis atterré par la médiocrité de recommandations formulées en public par certains professionnels de santé. Voir par exemple : Le mythe du pH (sanguin) lié à « l’acidité » des aliments, une légende urbaine propagée par de nombreux « naturopathes »… Les patients adhèrent volontiers à un récit simpliste qui peut se traduire, sur des catégories d’aliments, par un étiquetage « bon » ou « mauvais » ! À l’image du Nutri-scoreN3, voir mon article Vivre bien et longtemps.
Ce constat d’échec des recommandations nutritionnelles ne se limite bien entendu pas à la France : les médias en parlent dans tous les pays à « haut niveau de développement ». Une raison majeure de cet échec est la pression exercée sur les « experts » par les industriels de l’agro-alimentaire (et de la pharmacie). Aux USA, par exemple, une équipe a mesuré l’incidence des conflits d’intérêts avec les acteurs de l’industrie alimentaire et pharmaceutique au sein du Comité consultatif pour les lignes directrices diététiques pour les Américains (Dietary Guidelines for Americans, DGA) en 2020–2025 (Mialon M & al., 2022N4) :
Notre analyse a révélé que 95 % des membres du comité avaient des liens d’intérêt avec l’industrie alimentaire et/ou pharmaceutique et que certains acteurs, notamment Kellogg, Abbott, Kraft, Mead Johnson, General Mills, Dannon et International Life Sciences, avaient des liens avec plusieurs membres. Le financement de la recherche et l’appartenance à un conseil consultatif/exécutif représentaient conjointement plus de 60 % du nombre total d’informations sur les pays d’origine documentées.
Toujours aux USA, le patron de la Food and Drug Administration de 1990 à 1997, déclarait en 2018 : « Nous avons échoué dans nos recommandations diététiques à l’égard de la population. » Malgré cela, les « experts en nutrition » s’obstinent à répéter un discours formaté depuis des décennies par les industriels de l’agro-alimentaire (Roussel R, 2018N5). Car les citoyens américains ont bien suivi ces recommandations (voir graphe ci-contre) mais cela n’a pas pour autant empêché l’obésité, le diabète, les maladies cardiovasculaires et les maladies neuro-dégénératives de continuer à grimper en flèche !
Il serait toutefois hasardeux de prétendre que les humains se nourrissaient mieux dans « l’ancien temps »… Grâce à la traduction de centaines de manuscrits (Mc Dowell AG, 2011N6), on dispose aujourd’hui de données précises sur la pratique nutritionnelle des anciens Égyptiens. Dans The Arrow #155, Michael Eades écrit :
Pourquoi le régime alimentaire des premiers Égyptiens est-il important ? Parce qu’ils ont laissé un million de momies de cette époque. La plupart des documents archéologiques anciens sont uniquement des squelettes. Les données relatives aux momies égyptiennes comprennent des tissus mous.
Les anciens Égyptiens suivaient un régime alimentaire qui serait aujourd’hui le nirvana de tout nutritionniste. Beaucoup de pain complet, pas de sucre (le sucre n’est apparu que vers 1025 après J.-C.), une quantité minuscule de viande rouge, voire aucune, des légumes et un peu de poisson.
Pourtant, les momies de ces anciens habitants montrent qu’ils étaient atteints de toutes les maladies que les « experts » nutritionnels d’aujourd’hui vous diraient que le régime alimentaire de l’Égypte ancienne permet d’éviter. Ils souffraient de caries dentaires horribles, d’obésité, d’inflammation et d’athérosclérose, même à un âge précoce. Il est donc clair que leur régime alimentaire ne leur a pas été d’un grand secours.
Une mise à jour de la formation au regard des données récentes de la science me paraît urgente. Leur confusion s’ajoute à celle de thérapeutes « alternatifs » qui persistent à cultiver (et transmettre) des croyances dont l’ineptie a été démontrée depuis longtemps.
Taty LauwersN7 l’exprime en ces termes (2018N8 page 107) :
Les conseils diététiques officiels, tels qu’ils sont relayés par les media ou les associations d’éducation nutritionnelle, ne sont que de nécessaires recommandations de troupeau, loin d’être suffisants, assurément pas universels.
Les injonctions nutrimentaires parfois très strictes de l’une ou l’autre école nutritionniste ne sont souvent que la part visible d’un iceberg… celui de la soif de reconnaissance de leur gourou. Il se peut que, justement, ces normes-là correspondent à votre profil. Tant mieux pour vous, car vous venez de trouver tout de suite votre voie idéale.
Que faire si, par hasard, votre personnalité biologique ne correspond à aucun de ces schémas ? Ou si vous ne souhaitez pas investir votre énergie et votre temps en essais longs et multiples ?
Son ouvrage Au-delà des régimes (Lauwers T, 2018N9) remet les pendules à l’heure sur de nombreux sujets dans le domaine de la nutrition, en accord avec les récentes données de la science… L’auteure insiste à longueur de pages sur la diversité des besoins, des comportements, et au final des croyances qui conduisent les humains au même résultat — ce que des chercheurs en neurosciences qualifient de vicarianceN10.
Il est fréquent — et, pour beaucoup, agréable — d’entendre dire que la médecine est un art plutôt qu’une science, version déformée d’affirmations de philosophes du siècle dernier — entre autres Henri Bergson — qui la voyaient comme un art ET une science. Mais, dans la pensée New AgeN11 dominante, celle qui commande de « vider la tête », la dimension scientifique est évacuée et remplacée par l’intuition, donc la mise en veilleuse de toute pensée analytique, généralisante, critique. Cette même manière de (ne pas) penser vaut pour la nutrition : la seule vérité est mon expérience personnelle, celle que de méchants scientifiques écartent comme une donnée « anecdotique »… Pourquoi pas, mais, dans ce cas, puis-je émettre des recommandations applicables à d’autres que moi-même ?
Ce qui nourrit cette vision populiste est la fausseté d’études nutritionnelles dont les conclusions servent de prétexte à des conseils ou avertissements diffusés par les autorités sanitaires (et les industriels de l’agro-alimentaire). Voir mon article Faut-il jeter les enquêtes nutritionnelles ? Mais l’existence de mauvaises pratiques scientifiques suffit-elle à condamner toute la science ?
Dans deux articles sur ce sujet, j’ai fait part de mon expérience personnelle (en 2009) de la chrono-nutrition®N12 proposée par Dr Alain Delabos et collègues (2013N13). Aucun témoignage personnel ne peut prétendre à une portée scientifique. Il reste donc anecdotique mais peut ouvrir des pistes de réflexion. Cette pratique alimentaire que j’ai adoptée en 2009 paraissait répondre aux besoins de mon organisme, que ce soit l’élimination du surpoids (ma motivation initiale) ou le bon état général confirmé par des bilans sanguins — voir mon article Chrononutrition - expérience. Je ne prétends pas qu’elle convienne à tout le monde, ni qu’elle me convienne à tout moment, bien qu’elle s’appuie sur l’hypothèse de la chrononutrition, un terme générique apparu dans des publications récentes en chronobiologieN14.
Des travaux expérimentaux convergent vers le constat que les effets des aliments sont variables selon le moment de leur ingestion dans le rythme nycthéméralN15 (nuit/jour) qui gouverne notre système hormonal. Une mise en perspective scientifique de cette pratique me paraît donc souhaitable, qu’on la fasse sienne ou non. Le point commun entre les diverses observations de mécanismes nutritionnels est leur caractère oscillatoire sur une période de 24 heures. Ce domaine de recherche pourrait donc se limiter à la biologie circadienneN16 plutôt qu’à la chronobiologie au sens large.
Il est vraisemblable que plusieurs mécanismes oscillatoires fonctionnent en concurrence dans notre organisme, induisant une forte variabilité individuelle, d’où l’échec d’une approche normative. La détermination génétique des effets de régimes fait l’objet d’expérimentation animale (Barrington WT et al., 2016N17).
C’est dans cette variabilité que s’inscrivent les expériences d’(ovo-lacto-)végétarismeN18 qui peuvent être positives ou franchement négatives sur le long terme pour les un·e·s et les autres — voir mon article. Ma mise en garde à ce sujet est que tout régime privatif comporte des risques de carences en nutriments, y compris de ceux dont on ne mesure pas encore pleinement l’importance. Le cas de la vitamine D (voir mon article sur ce sujet) est emblématique de la découverte récente de désordres métaboliques attribués à une déficience, mais les médias restent silencieux sur d’autres nutriments importants comme la cholineN19 — voir mon article.
Le terme « régime » possède une ambiguïté dérangeante qui n’est pas signalée dans les dictionnaires. De manière indifférenciée, il s’agit d’une pratique alimentaire motivée par des préoccupations en matière de santéN20. Or certaines pratiques sont supposées préserver la santé sur le long terme, tandis que d’autres ne servent qu’à résoudre un problème particulier. C’est le cas des régimes privatifs amincissants : une fois l’objectif atteint, le retour à une diète équilibrée est inévitable ; celle-ci est en général différente de celle qui a précédé le régime.
On ne peut pas suggérer une restriction calorique importante — voir mon article Jeûne et restriction calorique — tout en affirmant que « ce n’est pas un régime » si elle ne satisfait pas les besoins de l’organisme dictés par son mode de vie. Les auteurs qui font la promotion de méthodes pour la perte de poids ont tendance à écrire que leur pratique « n’est pas un régime ». En réalité, ils cherchent plutôt à la démarquer d’autres régimes que leurs lecteurs ont essayé sans succès. Dans mon article Manger et bouger ?, j’ai cité par exemple Gary TaubesN21 dénonçant l’inutilité de tous les régimes amincissants pour finir par un éloge du régime AtkinsN22 !
Les vitamines B12 et K2 et leurs carences supposées font l’objet de nombreux articles. D’autres limites du végétarisme/végétalisme sont présentées par Denise Minger dans un article bien documenté (2016N23). Sur le même sujet, on peut lire son commentaire critique (2017N24) de l’ouvrage How Not To Die de Michael Greger et Gene Stone (2017N25). Ces discussions se retrouvent dans mes articles Pour les végan·e·s et Carnivore Code.
Les risques de carences sont éludés par des jeunes gens qui font la promotion enthousiaste sur d’innombrables vidéos de leur dernière trouvaille nutritionnelle ou d’une pratique de « détox ». Elles/ils sont à un âge où l’on peut faire n’importe quelle connerie — je ne m’en suis pas privé ! Il faut attendre la quarantaine (parfois plus) pour commencer à « payer la note »… 😣 Mais rares sont les auteurs qui publient un rectificatif après avoir pris conscience qu’ils s’étaient fourvoyés.
Dans l’étude Women’s Cohort Study (Dunneram Y et al., 2018N26), le suivi pendant 4 ans de 14 172 femmes âgées de 35 à 69 ans, en Grande Bretagne, a affiché des corrélations entre l’âge de survenue de la ménopause (chez 914 d’entre elles) et leurs habitudes nutritionnelles : une ration quotidienne supplémentaire de légumes était associée à une année de plus, une ration de poisson gras à trois années. La vitamine B6 et le zinc étaient aussi dans une association favorable. Par contre, le fait de consommer fréquemment du riz ou des pâtes était associé à une année et demi de moins. Le végétarisme (déclaré par certaines participantes) était lui aussi associé à une diminution de l’âge de la ménopause.
Yashvee Dunneram et ses collègues ont reconnu qu’il ne s’agissait que de corrélations statistiques — après stratification par âges et neutralisation de facteurs comme le poids et la consommation de tabac — sans valeur probante de liens de causalité. Dans la discussion (Dunneram Y et al., 2018N26), ils soumettent des hypothèses explicatives en s’appuyant sur d’autres études. La précocité de la ménopause est associée positivement à des risques d’ostéoporose, de dépression ou de maladies cardiovasculaires, mais négativement à ceux de cancers du sein, de l’utérus ou des ovaires.
Au registre de la variabilité, les travaux sur le microbiote intestinal (N28 ; N29) mettent en évidence une disparité de réponse, selon les individus, à l’absorption d’un même type d’aliment. L’étude Personalized Nutrition by Prediction of Glycemic Responses (Zeevi D. et al., 2015N27) montre par exemple que l’élévation du taux de glycémie suite à la consommation d’un même aliment varie considérablement d’un individu à un autre, avec des effets parfois inversés, mais que cette réponse est liée de manière prédictive à la composition de son microbiote intestinal.
Les auteurs en déduisent qu’il est souhaitable (et possible) de personnaliser les régimes visant à combattre l’obésité ou le diabète de type 2N30. Les conclusions de leur étude sont résumées sur une animation (2015N31) et exposées de manière très claire sur une vidéo de l’auteur principal Eran Segal (2015N32).
Bill Lagakos, spécialiste de biochimie nutritionnelle, commente ainsi ces travaux (Lagakos B, 2017N33) :
Cette étude corrobore un grand nombre de mes croyances au sujet de l’individualité en biologie humaine. Nous ne connaissons pas tous les mécanismes, mais nous savons que certaines personnes réagissent mieux à certaines interventions que d’autres. Nous apprenons beaucoup des études sur l’alimentation, la lumière, le sommeil, l’activité physique etc., mais il est très rare, voire impossible, que les résultats s’appliquent également à tout le monde — et certaines personnes font l’expérience d’effets complètement opposés ; par exemple, voir les travaux pour lesquels les données individuelles ont été fournies. L’exposition à la lumière peut améliorer la qualité du sommeil chez certains mais causer de l’agitation chez d’autres. Les régimes pauvres en glucides peuvent aider à la perte de poids chez certaines personnes, mais diminuer le gras sera meilleur pour d’autres. Les produits laitiers, le blé, les protéines, les probiotiquesN34 et les fibres ou l’amidon résistantN35 tombent tous dans cette catégorie. Les besoins de sommeil varient selon la personne, la saison, la géographie etc. Il n’y a pas de réponse systématique dans beaucoup de ces contextes.
Je recommande, pour approfondissement, la lecture du dossier thématique Régimes alimentaires et microbiote intestinal dans le numéro 9 (octobre 2017) de La Revue des MicrobiotesN36 éditée en France par une équipe multidisciplinaire.
La disparité de réponse aux apports nutritionnels est illustrée par des travaux visant à évaluer l’efficacité d’une supplémentation en probiotiquesN34. Voir par exemple le cas de Lactobacillus gasseri pour le traitement de l’obésité dans mon article Compléments alimentaires.
On franchit un nouveau seuil de complexité en tenant compte du fait que l’interaction entre le microbiote intestinal humainN28 et la nature des aliments est réciproque : la « flore intestinale » (le microbiote) évolue rapidement en réponse à nos habitudes nutritionnelles, outre qu’elle est influencée par d’autres facteurs de qualité de vie comme l’exercice et le sommeil — voir les nombreuses références sur un article d’Éric Cazin (2018N37). Le microbiote intestinal (radicalement différent dans les diverses parties de l’intestin) n’est par ailleurs qu’une pièce d’un puzzle auquel il faudrait ajouter les flores bactériennes buccales et stomacales… Certains soignants proposent l’analyse des gaz respiratoires pour diagnostiquer les surpopulations bactériennes à l’origine de dysbiosesN38. Cette approche n’a fait l’objet d’aucun essai clinique à ce jour.
Les auteurs de l’étude Personalized Nutrition by Prediction of Glycemic Responses (Zeevi D. et al., 2015N27) n’ont pas encore inclus d’autres facteurs comme l’exposition à la lumière, le sommeil, la saison etc. Quant à la chronobiologieN14, elle n’a pas dit son dernier mot, sachant que les bactéries de nos microbiotes vivent aussi en symbiose avec le rythme nycthéméralN15 — voir La Nouvelle Microbiologie : des microbiotes aux CRISPR de Pascale Cossart (2016N39).
Les « bons » et « mauvais » aliments ne sont donc pas obligatoirement les mêmes pour toute personne à tout âge, en tous lieux et à toute heure… L’équilibrage controversé entre glucides et lipides (voir mon article sur ce sujet) et le cas de l’insulinorésistanceN40 doivent être abordés sous l’angle de cette variabilité, en évitant toute généralisation hâtive.
La tentation est grande de prétendre avoir engrangé la synthèse de ces connaissances dans une approche thérapeutique universelle. On peut citer, parmi de nombreux cas, Jean-Marc RobinN41, « expert reconnu de nutrithérapie » — bien qu’absent de Google Scholar — invitant les obèses à un “reset total” (sic) de leur flore intestinale (lu dans la Lettre du Dr Rueff, 12 mai 2018)…
Ceci n’empêche pas de s’intéresser aux microbiotes du système digestif, à commencer par le microbiote buccal qui est la première barrière des bactéries indésirables — voir les articles La bouche, miroir de votre santé et Exercice et santé intestinale.
Autre facteur de complexité récemment découvert : notre système nerveux entériqueN42 contient cinq fois plus de neurones que la moelle épinière, ce qui se traduit par la métaphore (un peu idiote) : « L’intestin est notre deuxième cerveau ». Ce réseau neuronal communique avec le cœur et le cerveau dans les deux sens par l’intermédiaire du nerf vagueN43, mais on commence à remarquer qu’il interagit avec d’autres organes (voir Rakhilin N et al., 2016N44 et un article de Duke UniversityN45).
Voir plus loin…
La nutrigénomiqueN47 nous apprend que certains nutriments pourraient modifier l’expression des gènesN48, avec pour effet de favoriser ou inhiber le déclenchement de maladies graves « programmées » dans notre génome. Si tel est le cas, notre destinée s’inscrit en partie au quotidien dans notre assiette.
Il faut veiller toutefois à ne pas sombrer dans l’orthorexieN49, un comportement caractérisé par une réaction obsessionnelle contre la malbouffe. Il reste vrai que le lobby agro-industriel utilise ce qualificatif pour discréditer les lanceurs d’alertes qui dénoncent la qualité douteuse ou la traçabilité négligée de ses produits.
Pour ce qui relève du choix personnel, mon sentiment est que toute prescription nutritionnelle est basée sur 20 % de science et 80 % de croyance ! Ces chiffres sont purement illustratifs, mais une approche critique systématique a été accomplie par John Ioannidis et collègues (2018N50) affirmant que 95 % des études en nutrition seraient biaisées.
S’il est indéniable que la croyance produit des effets, il est raisonnable de ne pas négliger les 20 % de science. Un écueil à éviter est une prise de position sans nuance en faveur de certaines pratiques ou aliments… La controverse pour/contre la cuisson des légumes est emblématique de cette simplification abusive (voir N51).
Par ailleurs, il faut garder en mémoire qu’une meilleure pratique nutritionnelle est nécessaire mais pas suffisante à nous maintenir en bonne santé. L’entraîneur Jack LaLanneN52 disait : « L’exercice est roi et la nutrition est reine : avec les deux, vous avez un royaume. » Je recommande donc la lecture attentive des articles classés dans le chapitre Exercice, sans pour autant verser dans l’excès de ne raisonner qu’en termes de calories — voir mon article Manger et bouger.
Pour celles et ceux qui souffrent de surpoids ou d’obésité — j’ai longtemps, et plusieurs fois, connu ce désagrément — bien garder présent à l’esprit que si un thérapeute affirme régler durablement ce problème par le seul biais de la nutrition, cela veut dire qu’il est vendeur d’une méthode miracle, de produits, de livres ou de coaching… Mises à part de rares exceptions, l’obésité ne s’élimine pas durablement par la seule nutrition ; l’exercice pratiqué avec discernement est indispensable. De même, aucune pratique sportive n’écarte durablement le risque de surpoids sans être associée à une nutrition plus saine. J’insiste sur « durablement » pour souligner qu’on ne peut se fier à une évolution favorable sur quelques semaines ou quelques mois.
Une assimilation bénéfique des aliments implique une motilitéN53 correcte des organes digestifs. On peut lire à ce sujet l’article : Que faire face à la constipation ? par Chris Masterjohn, ainsi que la page Le duodénum (2021N54) par Renaud Roussel.
Le grignotage entre les repas est particulièrement délétère car il bloque un « balayage musculaire » du système digestif, toutes les deux heures — phase III du complexe moteur migrantN55 — qui ne se produit que lorsque l’estomac est vide.
C’est la combinaison judicieuse du choix de nos aliments et de l’exercice avec l’hydratation, des compléments alimentaires éventuels et un sommeil adaptés à nos besoins, qui assure notre plein épanouissement et nous protège contre la dégradation du vieillissement — voir mon article Vivre bien et longtemps. Tout ce que j’ai publié s’adresse en premier aux jeunes de 7 à 77 ans, et bien au-delà depuis que l’espérance de vie a augmenté… 😉
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Article créé le 21/08/2015 - modifié le 1/12/2024 à 14h36
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