Plus de 70 % des personnes âgées et des enfants vivant en France sont insuffisamment hydratés (voir siteN1). La surhydratation est plus rare ; elle peut se manifester chez des sportifs appliquant à l’excès les consignes d’hydratation pendant l’effort, provoquant une baisse de leur teneur sanguine en sodium et un gonflement des cellules qui peut être fatal (voir articleN2).
La sous-hydratation précède la sensation de soif. Celle-ci est déjà un signal de détresse. Chez les personnes âgées, les mécanismes régulateurs fonctionnent moins bien, au point de ne plus ressentir la soif et de tomber dans un état chronique de déshydratationN3 qui peut être dangereusement aggravé par la prise de médicaments diurétiquesN4.
L’étude de Ashima K Kant et al. (2009N5) sur la population nord-américaine indique que 63 % des personnes de 65 à 74 ans sont insuffisamment hydratées, cette proportion s’élevant à 73 % chez les 75–84 ans et 81 % chez les plus de 85 ans. Le problème augmente avec l’âge, et les conséquences peuvent être dramatiques car, si la déshydratation augmente le risque d’accident vasculaire cérébralN6, elle en multiplie aussi les effets : dans une étude présentée par l’American Stroke Association (2015), plus de la moitié des 168 personnes hospitalisées pour un AVC ischémiqueN7 étaient déshydratées, et les problèmes se sont aggravés ou sont restés les mêmes chez 42 % des patients déshydratés, contre seulement 17 % des patients hydratés (2015N8).
Sommaire
⇪ Ni trop ni trop peu
L’enquête publiée par Erica L Kenney et al. (2015N9) a déterminé que plus de la moitié des enfants américains de 6 à 19 ans étaient insuffisamment hydratés. Un quart des sujets ont déclaré qu’ils ne buvaient jamais de l’eau plate et se contentaient de boissons sucrées pour étancher leur soif.
La sous-hydratation réduit les performances physiques. Elle altère aussi la mémoire et les fonctions cognitives. Poussée à l’extrême et associée à du stress ou de la fatigue, elle peut déclencher un accident cardiaque ou un AVCN6. Une insuffisante hydratation peut être associée à de nombreux symptômes (voir pageN10) — fatigue et maux de tête, insomnie, crampes, asthme et allergies, hypertension, problèmes de digestion, constipation, calculs dans les reinsN11, maladies de la peau : psoriasisN12 etc.
Une étude récente menée à Loughborough University (voir pageN13) a mesuré que des chauffeurs sous-hydratés faisaient autant d’erreurs de conduite que sous l’effet de stupéfiants ou d’alcool.
Il est donc vital pour chacun de mettre en place des habitudes de boisson régulière, pendant ou autour des repas, en consommant une eau de la meilleure qualité à température modérée.
⇪ Que boire ?
Il me paraît inutile ici d’épiloguer sur les risques liés à la consommation de boissons sucrées — y compris (et surtout) en version « allégée » (voir pageN15) — ou encore de boissons énergisantes (voir pageN16). Tout comme les boissons alcoolisées, elles peuvent procurer du plaisir et de la sociabilité, mais elle ne devraient pas se substituer à la consommation d’eau.
Le verre de vin rouge quotidien préconisé par des études récentesN17 peut être envisagé (c’est un acte de foi !) comme un prébiotiqueN18 mais pas une boisson…
Les jus de fruits industriels à sucre ajouté — souvent du sirop de maïsN19 — seraient encore plus nocifs que les sodas en raison de leur teneur en fructose (voir articleN20). Le fructoseN21 est accusé d’être un des principaux moteurs du diabète de type 2N22 (voir articleN23). Les fruits sont aussi des sources de fructose (20 à 50 % de leurs glucides), quoique si on les consomme en entier la présence de fibres compense l’effet délétère du fructose, comme l’explique la vidéo Sugar : the bitter truthN24 de Dr Robert Lustig à l’Université de Californie.
L’orange pressée au petit-déjeuner est la parfaite illustration d’un mauvais conseil nutritionnel érigé en exemple — avec l’appui des marchands d’agrumes ! Elle apporte du sucre sous forme de fructoseN21 sans présence de fibres, empêchant l’assimilation correcte des graisses saturées, tout cela pour fournir une quantité dérisoire de vitamine C (voir articleN25). Dans 120 calories de fructose, 40 sont converties en graisse. La popularité de cette pratique pourrait s’expliquer par une addiction au fructoseN21 : Alors qu’on sait que le goût sucré provoque chez les animaux de laboratoire une addiction comparable à celle des drogues, le fructose, qui a un pouvoir sucrant cinq fois supérieur à celui du glucose, pourrait agir comme un « super-sucre » entraînant une véritable dépendance (voir pageN26).
Sur la page Faut il se méfier des fruits ?N27 Christophe Carrio expose les problèmes liés à la consommation de fructose et donne une idée des quantités à ne pas dépasser au quotidien. Un marqueur de cet excès serait l’accumulation de graisse abdominale. La dépendance au fructose se signale par un taux d’acide uriqueN28 (uricémie) supérieur à 50 mg/l.
Selon des études récentes, la consommation de café serait associée à une moindre mortalité, notamment par cancer et maladies cardiovasculaires. L’étude observationnelle d’e’Erikka Loftfield et al. (2018N29) portant sur 9.2 millions d’habitants du Royaume-Uni, conclut :
La consommation de café était inversement associée à la mortalité, y compris chez ceux qui buvaient 8 tasses ou plus par jour et chez ceux dont le polymorphisme génétique indiquait un métabolisme plus lent ou plus rapide de la caféine. Ces résultats suggèrent l’importance des constituants de la non-caféine dans l’association café-mortalité et renforcent l’assurance que la consommation de café peut faire partie d’une alimentation saine.
L’étude étant observationnelle, le lien de cause à effet n’a pas été établi, malgré que de nombreux facteurs confondants (âge, sexe, consommation d’alcool, habitudes de vie etc.) aient été neutralisés. Les chercheurs ignorent encore par quel processus cette protection est obtenue. Une piste à explorer serait la production de testostéroneN30 augmentée par le café. Cette hormone joue un rôle important aussi bien chez les femmes que les hommes, notamment par la biogenèse accélérée de mitochondriesN31.
Ne pas oublier toutefois que le café fait partie des boissons diurétiques. Sa consommation devrait donc être compensée par une plus forte consommation d’eau…
Un régime « sans sel » peut aussi être une cause de déshydratation chronique. Le besoin quotidien pour un adulte serait de 3 à 4 grammes alors que la Food and Drug Administration aux USA recommande 2.3 grammes — voir mon article Le sel est-il notre ami ? Certains médecins prescrivent moins de 1.5 grammes. Bien entendu, il faut tenir compte du sel contenu dans certains aliments, notamment les fromages et la plupart des produits de l’industrie alimentaire.
⇪ La qualité de l’eau
J’espère avoir démontré que l’eau plate est la seule source raisonnable d’hydratation au quotidien. L’eau se présente sous trois formes dans notre alimentation quotidienne : à l’intérieur des aliments, consommée en bouteille ou prise à la source.
Une eau fortement minéralisée risque d’être stockée dans l’espace intercellulaire et de contribuer à la cellulite (majoritairement chez les femmes). En chrono-nutrition® selon Delabos et collèguesN32, la consommation de soupes et de légumes chargés en eau fortement minéralisée est donc réduite au minimum pour favoriser l’amincissement.
Pour des raisons similaires, la consommation des eaux minérales devrait être modérée et répondre à des besoins précis (voir pageN33). Au quotidien, si l’on ne dispose pas d’un accès satisfaisant à l’eau potable, il est préférable de se tourner vers une eau de source en bouteille.
En France, le ministère de la santé publie des informations précises sur la qualité de l’eau potable distribuée par le réseau (voir pageN34). Il peut être utile de compléter ces données par une mesure de la qualité microbiologique et la détection de métaux ou de résidus de produits phytosanitaires. Des kits d’analyse sont vendus à un prix raisonnable par diverses officines (exempleN35).
Un dispositif de filtration ou d’épuration peut améliorer la qualité de l’eau pour son utilisation en consommation alimentaire, mais il faut le choisir après s’être bien renseigné pour éviter l’installation au prix fort d’un équipement inefficace ou surdimensionné (voir Que ChoisirN36 et WikipediaN37).
Les plus chanceux (j’en fais partie) sont ceux qui vivent à proximité d’une fontaine d’eau de source, ou qui peuvent se permettre, chaque jour, de marcher tout doucement vers une fontaine comme Le Petit Prince…
⇪ Arnaques – ou tempête dans un verre d’eau ?
De nombreux appareils sont commercialisés sous l’allégation de fournir une eau « alcalinisée » et « structurée », deux propriétés qui favoriseraient notamment l’hydratation des cellules et l’élimination des toxines (voir article sur le procédé KangenN39). Aucun de ces dispositifs n’a fait l’objet d’une vérification scientifique. Le site Water Cluster QuackeryN40 dresse une liste détaillée de théories fantaisistes construites autour de la notion d’eau structurée.
À ce sujet, je suis en total désaccord avec Joseph Mercola quand il fait la promotion du procédé Kangen (voir vidéoN41) ou se hasarde dans des conclusions hâtives à partir des travaux de Gerald Pollack sur l’exclusion zone water ‘EZ’ (voir entretienN42 et articleN43). Exemple de propos délirant :
Vous pouvez aussi produire de l’eau structurée en l’agitant [dans un tourbillon] ou en la refroidissant à 39° F [3.88° C]. Personnellement, je bois presque toujours de l’eau « tourbillonnée » [vortexed] depuis je suis devenu un grand admirateur de Viktor Schauberger [N44] qui a accompli beaucoup de travail de pionnier sur le tourbillonnage il y a un siècle. Le Dr Pollack a découvert qu’en créant un tourbillon dans un verre d’eau, on lui apporte de l’énergie, et de cette manière on renforce la structure de l’eau. D’après le Dr Pollack, N’IMPORTE QUELLE forme d’énergie apportée à l’eau semble capable de créer ou de construire de l’eau structurée.
Les « inventions » de SchaubergerN44 font partie de théories du complot en vogue chez ceux qui croient à « l’énergie libre »N45… Admettons que l’eau « énergisée » par vortex ne nécessite pas l’installation d’un appareillage coûteux ; si elle ne fait pas de bien elle ne doit pas non plus faire de mal (effet placeboN46). Mais on navigue ici à la lisière d’une pensée magique qui peut induire de faux espoirs chez une personne souffrante.
Un commentaire instructif de l’ouvrage de G. Pollack, The Fourth Phase of WaterN47 est publié par Charles Eisenstein (2014N48). Voir aussi l’article de Yoann Boyer (2022N49). Pollack a pris soin, dès l’introduction, de prévenir ses lecteurs que son modèle théorique était en grande partie spéculatif, mais il est tentant de s’appuyer sur le modèle en l’état pour « expliquer » des pratiques non-conventionnelles, comme ce fut le cas pour l’homéopathie à partir des travaux de Jacques BenvénisteN50 sur la « mémoire de l’eau »N51.
Une autre « arnaque » qui a fait son chemin chez les adeptes de « méthodes naturelles » est celle de l’eau enrichie en hydrogène. Elle est supposée faciliter la guérison de diabètes de type 2N22, voire même de cancers… Un dossier de Jérémy Anso (2023N52) montre que les études, même indépendantes, ne montrent aucun bienfait de la consommation de cette eau « miraculeuse » :
On réalise au terme de cette enquête que les bienfaits supposés des boissons enrichies en hydrogène sont fragiles, préliminaires et largement mis en avant par des sociétés savantes et des chercheurs qui en tirent un bénéfice financier. La majorité des signaux sont négatifs.
⇪ Nos besoins en eau
Ces besoins varient selon les personnes. Le minimum de 1.3 litre par jour pour un adulte est un simple repère, mais la surhydratation est aussi une mauvaise habitude, exposée en détail dans Fiber Menace (Monastyrsky K, 2008N53 pages 45–57). L’auteur réfute entre autres la croyance qu’une plus forte consommation d’eau permettrait de mettre fin à la constipation. Toutefois, sa position est un peu excessive et ne correspond pas aux données récentes sur les pratiques nutritionnelles.
Aucune norme ne peut être fixée, les besoins dépendant de l’âge, du poids, du sexe, de la quantité d’eau dans les aliments et du métabolisme (très variable) de chaque individu. Des formules comme q = ((p – 20) * 15 + 1500) / 1000, où p serait le poids en kilos et q la quantité quotidienne d’eau de boisson, ne servent qu’à mesurer l’incompétence de leurs auteurs !
Une surhydratation se traduit par un déséquilibre d’éléments vitaux (calcium, magnésium, sodium potassium…) qui peut avoir une incidence notamment sur le fonctionnement du cœur. La manière la plus sûre de vérifier que son hydratation est correcte est de comparer la couleur de son urine à un nuancier (voir imageN54).
Des indices de sous-hydratation sont les crampes, des migraines fréquentes, des calculs dans les reins et un besoin accru de consommation de sel. Un excès de sel pourrait contribuer à l’apparition de cancers (voir articleN55) ou de maladies auto-immunes (voir articleN56), mais l’abstinence totale n’est pas pour autant souhaitable : il faut avant tout veiller à un bon équilibre sodium-potassium — voir mon article Le sel est-il notre ami ?
La plupart des personnes adoptant une diète faible en glucides et riche en graisses (LCHF) commettent l’erreur de se sous-hydrater pendant les repas, ce qui peut avoir de graves conséquences. En chrono-nutrition® (N32), on recommande de boire 2 ou 3 verres d’eau (de 150 cl) pendant chacun des repas pour diluer un bol alimentaire que le choix des aliments rend très concentré. J’ai adopté cette pratique, bien que cette recommandation ne soit pas formulée aussi clairement dans les ouvrages du Dr Delabos.
La popularité de la diète cétogène et du régime « paléo », tous deux riches en protéines et en graisses, a mis en évidence un besoin accru d’hydratation associé à ces pratiques. Ce besoin est encore plus flagrant sous un climat chaud. Il en résulte qu’on est amené à consommer une plus grande quantité d’eau, y compris en dehors des repas. Pour éviter la déminéralisation, il est donc conseillé d’ajouter à cette eau des électrolytes sanguinsN57 (un mélange de sodium, potassium, calcium, magnésium) en vente au rayon des sportifs.
Les avis sont partagés chez les biologistes sur le meilleur moment pour s’hydrater (voir articleN58). L’important est d’être suffisamment hydraté pendant le repas et la digestion car le foie, notamment, a besoin de suffisamment d’eau pour bien fonctionner. On peut aussi s’hydrater en buvant suffisamment 30 minutes avant le repas. Dans tous les cas, éviter de boire immédiatement avant d’absorber des aliments solides pour ne pas trop diluer les sucs gastriques.
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Article créé le 26/09/2015 - modifié le 7/01/2024 à 16h24
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