Longévité

Le CO2 protecteur et le vieillissement

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Auteur : Raymond Peat (1936–2022)
Source : Protective CO2 and aging (2012N1)
➡ Cet article ne traite pas du CO2 et du climat… Voir mon dossier sur ce sujet.

Sommaire

Article de Ray Peat

⚪️ Les effets théra­peu­tiques de l’aug­men­ta­tion du dioxyde de carbone [CO2] sont de plus en plus large­ment recon­nus depuis quelques années. Même Jane Brody, la jour­na­liste du New York Times spécia­li­sée dans les ques­tions de santé, a mentionné favo­ra­ble­ment l’uti­li­sa­tion de la méthode ButeykoN2 pour l’asthme, et l’idée d’une « hyper­cap­nie tolé­rableN3 » pendant la venti­la­tion méca­nique, pour préve­nir les lésions pulmo­naires dues à l’ex­cès d’oxy­gène, a été discu­tée dans des revues médi­cales. Mais encore très peu de biolo­gistes recon­naissent son rôle en tant que facteur de protec­tion fonda­men­tal et univer­sel. Je pense qu’il sera utile d’exa­mi­ner quelques-unes des façons dont le dioxyde de carbone peut contrô­ler des situa­tions qui, autre­ment, sont mal comprises.

Le cerveau a un taux élevé de méta­bo­lisme oxyda­tif et fabrique donc une très grande propor­tion du dioxyde de carbone produit par un orga­nisme. Il régit égale­ment, dans une large mesure, le méta­bo­lisme des autres tissus, y compris leur consom­ma­tion d’oxy­gène et leur produc­tion de dioxyde de carbone ou d’acide lactique. Au sein d’une même espèce, le taux de consom­ma­tion d’oxy­gène augmente propor­tion­nel­le­ment à la taille du cerveau plutôt qu’au poids corpo­rel. Entre des espèces très diffé­rentes, le rôle du cerveau dans le méta­bo­lisme est encore plus évident, puisque le taux méta­bo­lique au repos corres­pond à la taille du cerveau. Par exemple, le cerveau d’un chat est à peu près de la même taille que celui d’un croco­dile, et leur consom­ma­tion d’oxy­gène au repos est simi­laire, malgré leur énorme diffé­rence de taille.

Le stress doit être compris comme un proces­sus qui se déve­loppe dans le temps, et le cerveau (en parti­cu­lier le néocor­tex et les lobes fron­taux) orga­nise les proces­sus d’adap­ta­tion et de déve­lop­pe­ment dans les dimen­sions spatiales et tempo­relles. La signi­fi­ca­tion d’une situa­tion influence la manière dont l’or­ga­nisme y répond. Par exemple, le stress lié à une immo­bi­li­sa­tion prolon­gée peut provo­quer des hémor­ra­gies et des ulcé­ra­tions gastro-intestinales impor­tantes, mais si l’ani­mal a la possi­bi­lité de mordre quelque chose pendant la période de stress (ce qui signi­fie qu’il est capable de se défendre et qu’il a la possi­bi­lité de s’échap­per), il peut éviter les ulcères liés au stress.

Le schéma de l’ac­ti­vité nerveuse dans tout le corps régit la capa­cité locale à produire du dioxyde de carbone. Lorsque le cortex du cerveau est endom­magé ou enlevé, l’ani­mal devient rigide, de sorte que le cortex est consi­déré comme ayant une « action inhi­bi­trice tonique » sur le corps. Mais lorsque les nerfs sont reti­rés d’un muscle (par exemple, par une mala­die ou un acci­dent), le muscle entre dans un état d’ac­ti­vité constante, et sa capa­cité à oxyder le glucose et à produire du dioxyde de carbone est réduite, tandis que son oxyda­tion des acides grasN4 persiste, augmen­tant la produc­tion de frag­ments oxyda­tifs toxiques des acides gras, ce qui contri­bue à l’atro­phie du muscle.

Les inten­tions, les attentes ou les projets de l’or­ga­nisme sont repré­sen­tés dans le système nerveux par une plus grande dispo­ni­bi­lité à l’ac­tion et, dans les organes et tissus contrô­lés par les nerfs, par une augmen­ta­tion ou une dimi­nu­tion de l’ef­fi­ca­cité oxyda­tive, analogue aux diffé­rences entre les muscles inner­vés et déner­vés. Ce schéma du système nerveux a été appelé « l’ac­cep­teur d’ac­tion », parce qu’il est conti­nuel­le­ment comparé à la situa­tion réelle, et affiné au fur et à mesure de l’éva­lua­tion de la situa­tion. L’état de l’or­ga­nisme, sous l’in­fluence d’un accep­teur d’ac­tion parti­cu­lier, est appelé « système fonc­tion­nel », compre­nant tous les compo­sants de l’or­ga­nisme qui parti­cipent le plus direc­te­ment à la réali­sa­tion de l’ac­tion adap­ta­tive prévue.

L’action des nerfs peut être consi­dé­rée comme anabo­li­santeN5 car, dans une situa­tion de stress où les hormones cata­bo­liques d’adap­ta­tion, comme le corti­solN6, augmentent, les tissus du système fonc­tion­nel sont proté­gés et, tandis que les tissus inac­tifs peuvent subir une auto­pha­gieN7 ou une autre forme d’in­vo­lu­tion, les besoins des tissus actifs sont satis­faits par les nutri­ments prove­nant de leur dégra­da­tion, ce qui leur permet de chan­ger et, le cas échéant, de croître en taille ou en complexité.

Le rôle du cerveau dans la protec­tion contre les lésions dues au stress, lors­qu’il envi­sage une ligne de conduite, trouve un paral­lèle dans les diffé­rences entre l’exer­cice concen­trique (posi­tif, raccour­cis­se­ment du muscle) et l’exer­cice excen­trique (néga­tif, allon­ge­ment sous tension), ainsi que dans les diffé­rences entre les muscles inner­vés et les muscles déner­vés. Lors d’un exer­cice excen­trique et d’une déner­va­tionN8, moins d’oxy­gène est utilisé et moins de dioxyde de carbone est produit, tandis que l’acide lactiqueN9 augmente, rempla­çant le dioxyde de carbone, et que plus de graisse est oxydée. Un stress prolongé dimi­nue égale­ment le dioxyde de carbone et augmente le lactate, tout en augmen­tant l’uti­li­sa­tion des graisses.

L’obscurité est stres­sante et cata­bo­liqueN10. Par exemple, chez les personnes vieillis­santes, l’urine du matin contient presque tout le calcium perdu au cours des 24 heures, et les mito­chon­driesN11 sont parti­cu­liè­re­ment sensibles aux effets destruc­teurs de l’obs­cu­rité. Le sommeil réduit les effets cata­bo­liques destruc­teurs de l’obs­cu­rité. Pendant la phase de sommeil à mouve­ments oculaires rapides (rêve), la respi­ra­tion est inhi­bée et le niveau de dioxyde de carbone dans les tissus s’ac­cu­mule. Dans un sommeil répa­ra­teur, la tension d’oxy­gène est souvent suffi­sam­ment basse et la tension de dioxyde de carbone suffi­sam­ment élevée pour déclen­cher la multi­pli­ca­tion des cellules souchesN12 et des mitochondries.

Les rêves repré­sentent « l’ac­cep­teur d’ac­tion » fonc­tion­nant indé­pen­dam­ment des infor­ma­tions senso­rielles avec lesquelles il inter­agit norma­le­ment. Pendant les rêves, le cerveau (à l’aide d’un système appelé système d’ac­ti­va­tion réti­cu­laire ascen­dant) se décon­necte des systèmes senso­riels. Je pense qu’il s’agit de l’équi­valent nerveux de l’ac­ti­vité muscu­laire concentrique/positive, dans le sens où le cerveau contrôle ses actions. La phase active et rêveuse du sommeil se produit plus fréquem­ment dans la dernière partie de la nuit, à l’ap­proche du matin. C’est la partie la plus stres­sante de la nuit, le corti­sol et d’autres hormones de stress attei­gnant un pic à l’aube, il serait donc raison­nable que les proces­sus défen­sifs du cerveau soient les plus actifs à ce moment-là. Le proces­sus de rêve dans le cerveau est asso­cié à une relaxa­tion muscu­laire profonde, qui est proba­ble­ment liée aux actions trophiques (répa­ra­trices) des nerfs.

Dans la Chine ancienne, les taoïstes s’in­té­res­saient à la longé­vité et, selon Joseph Needham (Science and Civilization in China), leurs méthodes incluaient l’uti­li­sa­tion d’herbes, de miné­raux et de stéroïdes extraits de l’urine d’en­fants. Certains de ceux qui reven­di­quaient une longé­vité extrême prati­quaient la respi­ra­tion contrô­lée et le tai-chi (impli­quant l’ima­ge­rie, le mouve­ment et la respi­ra­tion), géné­ra­le­ment tôt le matin, lorsque la réduc­tion du stress est la plus impor­tante. Pour autant que je sache, il n’existe pas d’études sur les niveaux de dioxyde de carbone chez les adeptes du tai-chi, mais la sensa­tion de chaleur dont ils font géné­ra­le­ment état suggère qu’il s’agit d’une hypoventilation.

Dans les années 1960, un cher­cheur russe a examiné les dossiers hospi­ta­liers concer­nant les mesures des nouveau-nés et a constaté que, depuis plusieurs décen­nies, la taille de leur tête avait augmenté. Il a suggéré que cela pouvait être le résul­tat de l’aug­men­ta­tion du dioxyde de carbone dans l’atmosphère.

On sait que les expé­riences et la nutri­tion d’une femelle en gesta­tion influencent l’ex­pres­sion des gènes de la progé­ni­ture, notam­ment en ce qui concerne les aller­gies, le taux méta­bo­lique, la taille du cerveau et l’in­tel­li­gence. Miles Storfer (1999A34) a passé en revue les preuves du contrôle envi­ron­ne­men­tal épigé­né­tiqueN13 de la taille du cerveau et de l’in­tel­li­gence. On sait aujourd’­hui que les prin­ci­paux méca­nismes des effets épigé­né­tiques ou de « l’empreinte » impliquent la méthy­la­tionN14 et l’acéty­la­tionN15 des chro­mo­somes (ADN et histonesN16).

Certains compor­te­ments, ainsi que la nutri­tion et d’autres facteurs envi­ron­ne­men­taux, augmentent la produc­tion et la réten­tion de dioxyde de carbone. Le niveau intra-utérin normal de dioxyde de carbone est élevé et il peut être augmenté ou dimi­nué par des chan­ge­ments dans la physio­lo­gie de la mère. Les effets du dioxyde de carbone sur de nombreux proces­sus biolo­giques impli­quant la méthy­la­tion et l’acé­ty­la­tion du maté­riel géné­tique suggèrent que la concen­tra­tion de dioxyde de carbone pendant la gesta­tion pour­rait régu­ler le degré de persis­tance de l’empreinte paren­tale chez le fœtus en déve­lop­pe­ment. Il existe des preuves d’une augmen­ta­tion de la démé­thy­la­tion asso­ciée à un faible niveau d’oxy­gène dans l’uté­rus (Wellman, et al., 2008). Un taux méta­bo­lique élevé et la produc­tion de dioxyde de carbone augmen­te­raient la capa­cité d’adap­ta­tion du nouvel orga­nisme, en dimi­nuant les empreintes géné­tiques limitantes.

Une réduc­tion rapide du dioxyde de carbone causée par l’hyper­ven­ti­la­tionN17 peut provo­quer une crise d’épi­lep­sie, augmen­ter les spasmes muscu­laires et les fuites vascu­laires, et — en libé­rant de la séro­to­nineN18 et de l’hista­mineN19 — contri­buer à l’in­flam­ma­tion et aux troubles de la coagu­la­tion. À plus long terme, une réduc­tion du dioxyde de carbone peut augmen­ter la produc­tion d’acide lactiqueN9, qui favo­rise l’in­flam­ma­tion et la fibroseN20. Une dimi­nu­tion prolon­gée du dioxyde de carbone peut accroître la sensi­bi­lité des protéines à la glyca­tionN21 — l’ajout d’al­dé­hydes, prove­nant de la peroxy­da­tionN22 des graisses poly-insaturéesN23 ou du méthyl­glyoxalN24 du méta­bo­lisme du lactate, aux groupes aminés —, et un proces­sus simi­laire est suscep­tible de contri­buer à la méthy­la­tion des histonesN16, un proces­sus qui s’ac­cen­tue avec le vieillis­se­ment. Les histones régulent l’ac­ti­vité génétique.

Avec le vieillis­se­ment, la méthy­la­tion de l’ADN augmente (Bork, et al., 2009). Je suggère que la méthy­la­tion stabi­lise et protège les cellules lorsque la crois­sance et la régé­né­ra­tion ne sont pas possibles — et qu’elle est suscep­tible d’aug­men­ter lorsque le CO2 n’est pas dispo­nible. L’hibernation (Morin et Storey, 2009) et la sporu­la­tion (Ruiz-Herrera, 1994 ; Clancy, et al., 2002) semblent utili­ser la méthy­la­tion à des fins de protection.

Le stress paren­tal, le stress préna­tal, le stress en début de vie et même le stress à l’âge adulte contri­buent à « l’empreinte des gènes », en partie par le biais de la méthy­la­tion de l’ADN et des histones.

La méthio­nineN25 et la choline sont les prin­ci­pales sources alimen­taires de donneurs de méthyle. La restric­tion de la méthio­nine a de nombreux effets protec­teurs, notam­ment une augmen­ta­tion de la longé­vité moyenne (42 %) et maxi­male (44 %) chez les rats (Richie et al., 1994). La restric­tion des donneurs de méthyle entraîne une démé­thy­la­tion de l’ADN (Epner, 2001). L’effet accé­lé­ra­teur de l’âge de la méthio­nine pour­rait être lié à la pertur­ba­tion de l’équi­libre de la méthy­la­tion, suppri­mant de manière inap­pro­priée l’ac­ti­vité cellu­laire. Outre son effet sur le pool de méthyle, la méthio­nine inhibe la fonc­tion thyroï­dienne et endom­mage les mito­chon­dries.
➡ Voir discus­sion dans l’ar­ticle Protéines.

La concen­tra­tion locale de dioxyde de carbone dans des tissus et organes spéci­fiques peut être ajus­tée par l’ac­ti­va­tion ou l’in­hi­bi­tion nerveuse et hormo­nale des enzymes anhy­drase carbo­niqueN26, qui accé­lèrent la conver­sion du CO2 en acide carbo­nique, H2CO3. L’activité de l’an­hy­drase carbo­nique peut déter­mi­ner la densité et la soli­dité du sque­lette, l’ex­ci­ta­bi­lité des nerfs, l’ac­cu­mu­la­tion d’eau, et peut régu­ler la struc­ture et la fonc­tion des tissus et des organes.

Habituellement, le dioxyde de carbone et le bicar­bo­nate ne sont consi­dé­rés qu’en rela­tion avec la régu­la­tion du pH, et seule­ment d’une manière très géné­rale. En raison de l’im­por­tance de main­te­nir le pH du sang dans une four­chette étroite, le dioxyde de carbone est géné­ra­le­ment consi­déré comme une toxine, car un excès peut provo­quer une perte de conscience et une acidose. Mais l’aug­men­ta­tion du dioxyde de carbone ne provoque pas néces­sai­re­ment une acidose, et l’aci­dose causée par le dioxyde de carbone n’est pas aussi nocive que l’aci­dose lactique.

Les grenouilles et les crapauds, en tant qu’am­phi­biens, sont parti­cu­liè­re­ment dépen­dants de l’eau et, dans les déserts ou les régions à saison sèche, ils peuvent survivre à une période de séche­resse prolon­gée en s’en­fouis­sant dans la boue ou le sable. Comme ils peuvent être enfouis à 10 ou 11 pouces [30 cm] sous la surface, on les trouve rare­ment et ils n’ont donc pas fait l’ob­jet d’études appro­fon­dies. Chez les espèces vivant dans le désert cali­for­nien, on sait qu’elles ont survécu à 5 ans d’en­fouis­se­ment sans pluie, malgré une tempé­ra­ture moyenne modé­ré­ment chaude dans leur envi­ron­ne­ment. L’une de leurs adap­ta­tions connues consiste à produire un niveau élevé d’urée, ce qui leur permet d’ab­sor­ber et de rete­nir l’eau de manière osmo­tique. (Les personnes très âgées présentent parfois un taux d’urée et une tension osmo­tique extrê­me­ment élevés.)

Certaines études de labo­ra­toire montrent que, lors­qu’un crapaud s’en­fonce dans la boue, la quan­tité de dioxyde de carbone dans ses tissus augmente. Leur peau fonc­tionne norma­le­ment comme un poumon, échan­geant de l’oxy­gène contre du dioxyde de carbone. Si les narines du crapaud sont à la surface de la boue, lorsque la dormance commence, sa respi­ra­tion ralen­tit progres­si­ve­ment, ce qui augmente encore le dioxyde de carbone. Malgré l’aug­men­ta­tion du dioxyde de carbone, le pH est main­tenu stable par une augmen­ta­tion du bicar­bo­nate (Boutilier RG et al., 1979A6). Une augmen­ta­tion simi­laire du bicar­bo­nate a été obser­vée chez les hamsters et les souris en hibernation.

En songeant à la longue dormance des grenouilles, je me suis souvenu d’un article de jour­nal que j’ai lu dans les années 1950. Des ouvriers qui démo­lis­saient une vieille struc­ture en béton avaient trouvé un crapaud dormant enfermé dans le béton, qui s’était ranimé peu de temps après avoir été libéré. Le béton avait été coulé des décen­nies auparavant.

Bien que l’étude systé­ma­tique des grenouilles et des crapauds pendant leur esti­va­tion natu­relle sous terre ait été très limi­tée, de nombreux rapports de décou­vertes acci­den­telles suggèrent que l’état de dormance peut être prolongé indé­fi­ni­ment si les condi­tions sont favo­rables. Le dioxyde de carbone a des effets anti­oxy­dants et de nombreuses autres actions stabi­li­sa­trices, y compris la protec­tion contre l’hy­poxie et les effets exci­ta­teurs du calcium intra­cel­lu­laire et de l’in­flam­ma­tion (Baev VI et al., 1978A2, 1995A3 ; Bari F et al., 1996A4 ; Boljevic S et al., 1996A5 ; Brzecka A, 2007A7 ; Kogan AKh et al., 1994A17 ; Malyshev et al., 1995A26).

Lorsque les mito­chon­driesN11 sont « décou­plées », elles produisent plus de dioxyde de carbone que la normale, et ces mito­chon­dries produisent moins de radi­caux libres. Les animaux dont les mito­chon­dries sont décou­plées vivent plus long­temps que les animaux dont les mito­chon­dries ordi­naires, plus effi­caces, produisent davan­tage de frag­ments oxyda­tifs réac­tifs (Andrews ZB & TL Horvath, 2009A1). Le taux élevé d’oxy­da­tion des mito­chon­dries non couplées a notam­ment pour effet d’éli­mi­ner les acides gras poly-insaturésN23 qui pour­raient autre­ment être inté­grés dans les struc­tures tissu­laires ou fonc­tion­ner comme des signaux de régu­la­tion inappropriés.

Les oiseaux ont un taux méta­bo­lique plus élevé que les mammi­fères de même taille et vivent plus long­temps. Leurs tissus contiennent moins d’acides gras haute­ment insa­tu­rés. Les abeilles reines, qui vivent beau­coup plus long­temps que les abeilles ouvrières, ont prin­ci­pa­le­ment des graisses mono-insaturées dans leurs tissus, tandis que les tissus des abeilles ouvrières à vie courte, qui reçoivent un régime alimen­taire diffé­rent, dans les deux semaines suivant l’éclo­sion, contiennent des graisses forte­ment insaturées.

Les chauves-souris ont un taux méta­bo­lique très élevé et une durée de vie extrê­me­ment longue pour un animal de leur taille. Alors que la plupart des animaux de leur petite taille ne vivent que quelques années, de nombreuses chauves-souris vivent plusieurs décen­nies. Les grottes des chauves-souris contiennent géné­ra­le­ment un peu plus de dioxyde de carbone que l’at­mo­sphère exté­rieure, mais aussi une grande quan­tité d’am­mo­niac. Les chauves-souris main­tiennent un niveau élevé de dioxyde de carbone dans leur sérum, ce qui les protège des effets toxiques de l’ammoniac.

Le rat-taupe nuN27, un autre petit animal à la durée de vie extrê­me­ment longue (en capti­vité, il a vécu jusqu’à 30 ans, soit 9 ou 10 fois plus long­temps que des souris de la même taille), a un méta­bo­lisme de base faible, mais je pense que les mesures effec­tuées en labo­ra­toire ne sont pas repré­sen­ta­tives de leur méta­bo­lisme dans leur habi­tat natu­rel. Ils vivent dans des terriers fermés, de sorte que le pour­cen­tage d’oxy­gène est infé­rieur à celui de l’air exté­rieur, et le pour­cen­tage de dioxyde de carbone varie de 0,2 % à 5 % (le CO2 atmo­sphé­rique est d’en­vi­ron 0.038). La tempé­ra­ture et l’hu­mi­dité dans leurs terriers peuvent être extrê­me­ment élevées, et pour être très signi­fi­ca­tif, leur taux méta­bo­lique devrait être mesuré lorsque la tempé­ra­ture de leur corps est augmen­tée par la chaleur du terrier.

Ces animaux sont origi­naires des hautes plaines du Kenya et de l’Éthiopie, où la faible pres­sion atmo­sphé­rique est suscep­tible d’aug­men­ter le niveau de dioxyde de carbone dans leurs tissus. Par consé­quent, je doute que la longé­vité obser­vée en labo­ra­toire reflète fidè­le­ment la longé­vité des animaux dans leur habi­tat normal.

Outre le fait qu’ils vivent dans un espace clos à forte teneur en dioxyde de carbone, les rats-taupes présentent une autre simi­li­tude avec les abeilles. Dans chaque colo­nie, il n’y a qu’une seule femelle qui se repro­duit, la reine, et, comme la reine des abeilles, elle est le plus gros indi­vidu de la colo­nie. Dans les ruches, les ouvrières régulent soigneu­se­ment la concen­tra­tion de dioxyde de carbone, qui varie d’en­vi­ron 0.2 % à 6 %, comme dans la colo­nie de rats-taupes. Une teneur élevée en dioxyde de carbone active les ovaires de la reine des abeilles, augmen­tant ainsi sa fertilité.

Comme les reines des abeilles et les rats-taupes vivent dans l’obs­cu­rité, je pense que leur teneur élevée en dioxyde de carbone compense le manque de lumière. (La lumière et le CO2 contri­buent à main­te­nir le méta­bo­lisme oxyda­tif et à inhi­ber la forma­tion d’acide lactique). On pense que les rats-taupes dorment très peu. Pendant la nuit, les personnes normales tolèrent plus de CO2 et respirent donc moins, surtout vers le matin, avec un sommeil actif et rêveur plus important.

Le rat-taupe n’a jamais déve­loppé de cancer. Son taux sérique de protéine C‑réactiveN28 est extrê­me­ment bas, ce qui indique qu’il est résis­tant à l’in­flam­ma­tion. Chez les humains et les autres animaux suscep­tibles de déve­lop­per un cancer, l’un des gènes suscep­tibles d’être réduits au silence par le stress, le vieillis­se­ment et la méthy­la­tion est le gène p53N29, un gène suppres­seur de tumeurs.

Si l’ex­pé­rience intra-utérine, avec peu d’oxy­gène et beau­coup de dioxyde de carbone, sert à « repro­gram­mer » les cellules pour élimi­ner les effets accu­mu­lés de l’âge et du stress, et ainsi maxi­mi­ser le poten­tiel de déve­lop­pe­ment du nouvel orga­nisme, une vie vécue avec des niveaux d’oxy­gène et de dioxyde de carbone proches de ces valeurs pour­rait être en mesure d’évi­ter le silen­çage progres­sif des gènes et la perte de fonc­tion qui causent le vieillis­se­ment et les mala­dies dégénératives.

On pense aujourd’­hui que plusieurs mala­dies et syndromes impliquent une méthy­la­tion anor­male des gènes. Le syndrome de Prader-WilliN30, le syndrome d’AngelmanN31 et divers « troubles du spectre autis­tique », ainsi que le syndrome de stress post-traumatiqueN32 et plusieurs types de cancer semblent impli­quer un excès de méthylation.

Une restric­tion modé­rée de la méthio­nine — par exemple, l’uti­li­sa­tion régu­lière de géla­tine dans le régime alimen­taire — pour­rait être pratique, mais si l’aug­men­ta­tion du dioxyde de carbone peut acti­ver les enzymes démé­thy­lasesN33 de manière contrô­lée, cela pour­rait être un trai­te­ment utile pour les mala­dies dégé­né­ra­tives et pour le vieillis­se­ment lui-même.

La faible produc­tion de dioxyde de carbone dans l’hypo­thy­roï­dieN34 — par exemple, Lee et Levine (1999A24) — et l’al­ca­lose respi­ra­toire de l’ex­cès d’œstro­gènesN35 sont souvent négli­gées. Un apport adéquat en calcium, et parfois une supplé­men­ta­tion en sel et en bicar­bo­nate de soude, peuvent augmen­ter la teneur en CO2 des tissus. ⚪️

Compléments de lecture et vidéos

  • Video Ray Peat and Bud Weiss – The Biology of Carbon Dioxide (2010N36)
  • Voir l’ef­fet Bohr sur Wikipedia = N37
  • Articles de Ray Peat = N38
  • Résumé du sujet CO2 versus NO dans mon article Soigner ses artères

○ Vidéo CO2 is Good and Nitric Oxide is Bad For You’ – Was Ray Peat Right ?
Elwin Robinson et Krissy Hawkes (2023N39) — English + fran­çais
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✓ Références

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- Pour visi­ter « 0bim », entrer dans un navi­ga­teur l’adresse « https://​leti​.lt/0bim ».
- On peut aussi consul­ter le serveur de liens https://leti.lt/liens et la liste des pages cibles https://leti.lt/liste.

  • A1 · bi8p · Andrews, ZB & TL Horvath (2009). Uncoupling protein‑2 regu­lates lifes­pan in mice. Am J Physiol Endocrinol Metab 296, 4 : E621‑7.
  • A2 · sd6z · Baev, VI et al. (1978). [Role of CO2 fixa­tion in increa­sing the body’s resis­tance to acute hypoxia.]. Fiziologicheskii Zhurnal SSSR Imeni I. M. Sechenova 64, 10 : 1456–1462.
    Chez les rats, le phéno­mène d’aug­men­ta­tion consi­dé­rable de la résis­tance à l’hy­poxie aiguë obser­vée après un séjour de 2 heures dans des condi­tions d’aug­men­ta­tion progres­sive de la concen­tra­tion de CO2, de dimi­nu­tion de la concen­tra­tion d’O2 et de refroi­dis­se­ment externe à 2–3 degrés semble être basé prin­ci­pa­le­ment sur des chan­ge­ments dans la concen­tra­tion de CO2 (en consé­quence, PCO2 et d’autres formes de CO2 dans le sang). La résis­tance élevée à l’hy­poxie aiguë se déve­loppe égale­ment après l’ad­mi­nis­tra­tion sous-cutanée ou i.v. de 1.0 ml de solu­tion aqueuse (169.2 mg/200 g) de NaHCO2, (NH4)2SO4, MgSO4, MnSO4 et ZnSO4 (en propor­tion : 35 : 5 : 2 : 0,15 : 0,15, resp.) ou après un effet d’une heure d’hy­per­cap­nie et d’hy­poxie accrues sans refroidissement.
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    Des méca­nismes adap­ta­tifs peuvent dimi­nuer les effets néfastes de l’hy­poxie nocturne récur­rente dans l’apnée obstruc­tive du sommeil (AOS). Le rôle poten­tiel d’une concen­tra­tion élevée de dioxyde de carbone (CO2) dans l’amé­lio­ra­tion de l’oxy­gé­na­tion du cerveau chez les patients souf­frant d’un syndrome d’apnée obstruc­tive du sommeil sévère est discuté. Le CO2 augmente l’ab­sorp­tion d’oxy­gène par son influence sur la régu­la­tion de la venti­la­tion alvéo­laire et de l’adé­qua­tion ventilation-perfusion, faci­lite l’ap­port d’oxy­gène aux tissus en modi­fiant l’af­fi­nité de l’oxy­gène pour l’hé­mo­glo­bine et augmente le débit sanguin céré­bral par ses effets sur la pres­sion arté­rielle et sur les vais­seaux céré­braux. Des études cliniques récentes montrent une amélio­ra­tion de l’oxy­gé­na­tion du cerveau lorsque l’hy­poxie est combi­née à l’hy­per­cap­nie. Les proprié­tés anti-inflammatoires et protec­trices contre les lésions orga­niques du CO2 peuvent égale­ment avoir une impor­tance théra­peu­tique. Ces effets biolo­giques de l’hy­per­cap­nie peuvent amélio­rer l’oxy­gé­na­tion du cerveau dans des condi­tions hypoxiques. Cela peut être parti­cu­liè­re­ment impor­tant chez les patients souf­frant d’un syndrome d’AOS sévère.
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    OBJECTIF : Les patients atteints d’hy­po­thy­roï­die sévère repré­sentent un défi unique pour les anes­thé­sistes et présentent des risques pério­pé­ra­toires beau­coup plus élevés. Globalement, ils présentent une sensi­bi­lité accrue aux anes­thé­siques, une inci­dence plus élevée de morbi­dité cardio­vas­cu­laire pério­pé­ra­toire, des risques accrus d’in­suf­fi­sance venti­la­toire post­opé­ra­toire et d’autres dérè­gle­ments physio­lo­giques. La base physio­lo­gique décrite précé­dem­ment pour l’in­ci­dence accrue de l’échec venti­la­toire post­opé­ra­toire chez les patients hypo­thy­roï­diens comprend une dimi­nu­tion des réponses venti­la­toires centrales et péri­phé­riques à l’hy­per­car­bie et à l’hy­poxie, une faiblesse muscu­laire, une dépres­sion de la pulsion respi­ra­toire centrale et l’hy­po­ven­ti­la­tion alvéo­laire qui en résulte. Ces échecs venti­la­toires sont le plus souvent asso­ciés à une hypoxie sévère et à une réten­tion de dioxyde de carbone (CO2). Le but de ce rapport clinique est de discu­ter d’une présen­ta­tion anes­thé­sique inté­res­sante et unique d’un patient souf­frant d’hy­po­thy­roï­die sévère.
    CARACTÉRISTIQUES CLINIQUES : Nous décri­vons un cas unique d’in­suf­fi­sance venti­la­toire chez un homme de 58 ans souf­frant d’hy­po­thy­roï­die sévère. Il avait une fréquence respi­ra­toire pério­pé­ra­toire (3–4 bpm) et un volume venti­la­toire minute extrê­me­ment bas, et a déve­loppé en même temps une alca­lose respi­ra­toire aiguë primaire et une hypo­car­bie asso­ciée (P(ET)CO2 d’en­vi­ron 320–322 mmHg).
    CONCLUSION : L’échec venti­la­toire de notre patient était basé sur une venti­la­tion minute et une fréquence respi­ra­toire inac­cep­ta­ble­ment basses, inca­pables de main­te­nir une oxygé­na­tion adéquate. Son méta­bo­lisme basal profon­dé­ment abaissé et sa produc­tion réduite de CO2, résul­tant proba­ble­ment d’une hypo­thy­roï­die sévère, ont pu entraî­ner le déve­lop­pe­ment d’une alca­lose respi­ra­toire aiguë en dépit de la dimi­nu­tion simul­ta­née de la venti­la­tion minute.
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    L’expression orches­trée des gènes est essen­tielle au déve­lop­pe­ment et à la survie de chaque orga­nisme. Outre le rôle des facteurs de trans­crip­tion, la dispo­ni­bi­lité des gènes pour la trans­crip­tion est contrô­lée par une série de protéines qui régulent le remo­de­lage épigé­né­tique de la chro­ma­tine. Les deux phéno­mènes épigé­né­tiques les plus étudiés sont la méthy­la­tion de l’ADN et les modi­fi­ca­tions de la partie termi­nale des histones. Bien qu’un grand nombre d’ou­vrages impliquent la déré­gu­la­tion de l’acé­ty­la­tion des histones et de la méthy­la­tion de l’ADN dans la patho­ge­nèse du cancer, les méca­nismes épigé­né­tiques ont récem­ment fait l’ob­jet d’une grande atten­tion de la part de la commu­nauté neuros­cien­ti­fique. En fait, un nouveau champ de recherche émerge rapi­de­ment et les preuves s’ac­cu­mulent désor­mais que la machi­ne­rie molé­cu­laire qui régule l’acé­ty­la­tion des histones et la méthy­la­tion de l’ADN est inti­me­ment impli­quée dans la plas­ti­cité synap­tique, et est essen­tielle à l’ap­pren­tis­sage et à la mémoire. Il est impor­tant de noter que le dysfonc­tion­ne­ment de l’ex­pres­sion épigé­né­tique des gènes dans le cerveau pour­rait être impli­qué dans les mala­dies neuro­dé­gé­né­ra­tives et psychia­triques. En parti­cu­lier, on a décou­vert que l’in­hi­bi­tion des histones désa­cé­ty­lases atté­nue la perte synap­tique et neuro­nale dans les modèles animaux de diverses mala­dies neuro­dé­gé­né­ra­tives et améliore les fonc­tions cogni­tives. Dans cet article, nous résu­mons les données récentes dans le nouveau domaine de la neuroé­pi­gé­né­tique et nous discu­tons de la ques­tion de savoir pour­quoi les stra­té­gies épigé­né­tiques sont des approches théra­peu­tiques appro­priées pour le trai­te­ment des mala­dies du cerveau.
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    L’hypercapnie a réduit les réponses provo­quées par le NMDA de manière dépen­dante de la concen­tra­tion, 7.5 et 15 % de CO2 dans le mélange respi­ra­toire rédui­sant l’am­pli­tude de la dépo­la­ri­sa­tion à 74 % et 64 % de celle des stimuli initiaux, respec­ti­ve­ment. L’application de 50 mM de NH4+ a progres­si­ve­ment réduit le pH du dialy­sat, et une acidi­fi­ca­tion supplé­men­taire a été obser­vée lorsque l’ad­mi­nis­tra­tion de NH4+ a été inter­rom­pue. La perfu­sion de NMDA après l’ap­pli­ca­tion de NH4+ a provo­qué des dépo­la­ri­sa­tions plus faibles (56 % du contrôle corres­pon­dant, 5 minutes après l’éli­mi­na­tion du NH4+), et cet effet a persisté pendant plus d’une heure. Ensemble, ces résul­tats démontrent que l’aci­dose extracel­lu­laire, telle que celle asso­ciée à une acti­va­tion neuro­nale exces­sive ou à l’is­ché­mie, inhibe les réponses provo­quées par le NMDA in vivo.
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    La neuro­ge­nèse dans le cerveau des mammi­fères adultes implique l’ex­pres­sion, en fonc­tion de l’ac­ti­vité, de gènes essen­tiels à la proli­fé­ra­tion des progé­ni­teurs et à la matu­ra­tion neuro­nale. Une étude récente suggère que le gène de réponse au stress Gadd45b (growth arrest and DNA-damage-inducible protein 45 beta) peut être tran­si­toi­re­ment induit par l’ac­ti­vité neuro­nale et peut promou­voir la neuro­ge­nèse adulte par une démé­thy­la­tion dyna­mique de l’ADN des promo­teurs de gènes spéci­fiques dans l’hip­po­campe adulte. Ces résul­tats apportent des preuves à l’ap­pui des idées provo­ca­trices selon lesquelles une démé­thy­la­tion active de l’ADN peut se produire dans les neurones post­mi­to­tiques et que la régu­la­tion épigé­né­tique dyna­mique médiée par la méthy­la­tion de l’ADN est impli­quée dans la régu­la­tion des chan­ge­ments durables de la plas­ti­cité neuro­nale dans le cerveau des mammifères.

▷ Liens

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Article créé le 17/12/2023 - modifié le 21/12/2023 à 10h31

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